Le racisme « bienveillant » ou pourquoi mon prochain Pape devra être africain

Fidèles catholique assis sur des pierres lors d'une messe dominicale dans une Eglise en "plein air" du village de Zambo, Burkina Faso

Le collège de cardinaux s’apprête à élire le nouveau Pape, souverain pontife, chef et guide des catholiques. A l’heure des médias, le choix qu’ils feront devra être particulièrement judicieux et stratégique.  Or, il me parait clair, pour les raisons que je vais présenter ici, que l’élection d’un Pape natif du continent africain serait de nature à protéger et à redynamiser l’Eglise catholique.

Une évidente logique démographique

La première raison est le nombre de fidèles assidus aux messes du dimanche en Afrique qui est sans commune mesure avec celui constaté en Europe. Certes, l’Afrique ne compterait que 160 millions de catholiques alors que l’Europe en accueillerait 260 millions. Mais la proportion de fidèles effectivement pratiquants est évidemment très supérieure en Afrique.

Je me rappelle d’une messe dominicale à Zambo, village burkinabè à la frontière ghanéenne, où des centaines de catholiques venaient de tous les villages à ronde, parcourant parfois 20 ou 30 kilomètres de pistes poussiéreuses à vélo pour s’asseoir sous un arbre et assister à la cérémonie.

Cette ferveur populaire n’existe plus depuis bien longtemps dans les églises de France où le dimanche se pressent principalement quelques caricatures de croyants sortis du film « La vie est un long fleuve tranquille » et n’usant les bancs que par tradition et statut social. C’est bien l’une des raisons pour lesquelles, excepté en été pour me rafraîchir,  je ne vais pas à l’église en France.

La foi catholique est donc plus vivace et plus sincère en Afrique qu’elle ne l’est en France ou en Espagne.

Fidèles catholique assis sur des pierres lors d'une messe dominicale dans une Eglise en "plein air" du village de Zambo, Burkina Faso
Fidèles catholiques assis sur des pierres lors d’une messe dominicale dans une église en « plein air » du village de Zambo, Burkina Faso (photo : Christian COSTEAUX)

Un voyage médiatique plus exotique que pour un Pape tchèque ou texan

En effet, c’est l’origine papale africaine qui concentrerait tous les commentaires de la caste journalistique (reportages dans le village natal du Saint Père, tour des manifestations de joie dans les capitales africaines, etc…). Ca nous ferait au moins voyager dans les médias, et, en cette fin d’hiver, j’avoue préférer voir un reportage dans la cathédrale de Cotonou que dans une église de Bavière. Peu importe ainsi la philosophie du futur Pape ! Même plus traditionaliste encore que son prédécesseur, ce n’est pas sa vision de l’Eglise qui sera mise en exergue mais sa nationalité qui enfin ne sera pas européenne.

Une immunité papale offerte à leur insu par les médias

Le journaliste français est profondément raciste. Le plus raciste étant très généralement celui qui ne le sait pas. Car une bienveillance ahurie envers une personnalité en raison de son origine ou de sa couleur est évidemment raciste. Pour qualifier cette tare, il ne faut en effet pas s’arrêter à la nature de l’intention, bonne ou mauvaise. Faire l’aumône à quelqu’un ou louer ses qualités en raison de la couleur de sa peau relève du même processus que lui filer un coup de pied pour cette même raison.

Grâce à l’autocensure de médias très majoritairement indigents, avoir un Pape africain permettrait donc aux catholiques de se voir épargner les perpétuelles rengaines  agressives et caricaturales contre la communauté catholique que les journalistes regrettent de ne pas être à l’image de leur idéal progressiste.

Ils n’oseront évidemment pas interroger les catholiques d’Accra, de Ziguinchor ou de N’Djamena, sur leur opinion du « mariage pour tous », de la famille, de l’avortement ou des contraceptifs. Ce serait en effet bien dangereux pour la presse française qu’elle réalise elle-même que ce qui fait le gouffre entre le Béninois moyen et l’électeur socialiste français de base, ce n’est pas la régularisation, ou non, de quelques sans papiers mais bel et bien la nature même des sociétés sans avenir que nous construisons en Europe.

Ce mépris et cette haine grandissante que portent les sociétés africaines (et que je partage) aux mœurs européennes, le journaliste français n’aurait d’ailleurs pas besoin d’un billet Paris-Conakry pour la constater.  Une simple visite sur les forums des sites africains ou dans la rubrique « commentaires » des médias en ligne du continent leur permettrait enfin de comprendre l’abysse qui se creuse jour après jour entre leur vision du progrès et celle que finalement partagent le croyant africain et un grand nombre de Français qui manifestaient il y peu dans la rue. Fossé présent à l’intérieur même du pays si l’on écoute le formidable plaidoyer du député socialiste de la Martinique Bruno Nestor Azerot. Un peu comme un Pape africain serait épargné d’une critique virulente de sa politique ultra-traditionaliste, ce député courageux a été épargné par son camp socialiste parce qu’il est martiniquais, nouvel exemple de ce racisme sournois car d’apparence bienveillante.

Une élection pédagogique

Le journaliste a de commun avec l’ahuri gauchisant (les deux se confondant d’ailleurs souvent) d’expliquer la désaffection des églises en France par le refus de celle-ci « d’évoluer ».  Une église qui marierait les folles ou ferait l’apologie de l’avortement et de la capote attirerait selon eux beaucoup plus de fidèles.

Or, c’est bien méconnaître la réalité et avoir comme on dit « de la merde dans les yeux » que de faire un tel constat. Car les églises qui sont pleines en France sont justement celles qualifiées de « traditionalistes ». Et que toutes les églises sont pleines en Afrique et n’ont pas à leur tête des stars télévisuelles et progressistes comme Lustiger ou Monsieur 23. Le fait est que l’essentiel des cardinaux, évêques ou prêtres catholiques d’Afrique a une position sur les grands thèmes de société qui les place dans le camp des religieux les plus traditionalistes de l’Eglise.

Une grande folle progressiste élue Pape serait pour cette raison précise catastrophique pour la confiance que l’Afrique a en l’Eglise catholique. Et, bien que ce ne soit pas la vocation d’un Pape de plaire aux autres religions en devenant une espèce de Chalghoumi catholique, la relativement bonne entente qui règne entre chrétiens et musulmans en Afrique serait grandement mise à mal par des positions papales progressistes telles que celles que voudraient voir appliquer les médias occidentaux et particulièrement ceux de France, pays des Noix de l’Homme.

Mes amis de Fadiouth, Palmarin ou Zambo (qui ont tous un portrait de Benoit XVI dans leur salon et un costume au tissu commémoratif de la dernière visite du Pape dans le pays) prendront le souverain pontife qui viendra sans se préoccuper, à l’inverse des journalistes français, de la couleur de sa peau ou de sa nationalité.  Ils continueront à se signer à chaque son de cloche ou à chaque passage devant un calvaire même après l’élection d’un Pape aux yeux bridés.

Ma soeur n'est-elle pas le sosie de Whoopi Goldberg dans Sister Act ?
* PS : Ma soeur n’est-elle pas le sosie de Whoopi Goldberg dans Sister Act ?